Ilha Grande

Avant de quitter Parati et de grimper dans le bus qui doit nous mener à Angra dos Reis, nous faisons une nouvelle découverte culinaire à tomber par terre. L’açaï. Pfiouh! Une bombe. De son vrai nom, euterpe oleracea, l’açaï est un palmier. Son fruit, l’açaï (aussi), de couleur pourpre, possède un pouvoir antioxydant élevé. Cultivé un peu partout au Brésil, c’est un aliment fondamental pour les habitants d’Amazonie. Son succès a évidemment un effet néfaste pour ces derniers. On ne peut que vous le conseiller tel que le mange les brésiliens (et les brésiliennes pour maintenir la ligne, surtout après une bonne feijoada), à savoir en sorbet, dans un bol, avec des céréales et des morceaux de fruits. Principalement de la banane. Rafraîchissant, savoureux, une texture agréable et des propriétés blindantes!

Rejoindre Ilha Grande depuis Parati est un jeu d’enfants. Un petit bus local, aux sièges durs comme de la pierre, pendant un peu moins de 3 heures. Et un ferry aux relents de gasoil pendant 1h45. Ce petit trajet s’effectue en longeant une superbe côte: escarpée, accidentée, verte et ensoleillée. Durant le parcours, nous faisons la rencontre de Saskja et Raimund, un jeune couple d’allemands. Le séjour à Ilha Grande, ce sera avec eux.

Ilha Grande est la plus grande île de l’Etat de Rio, entourée d’une série de petites îles bien fournies en belles plages, d’un grand village nommé Abraão et de deux pics avoisinant les 1000m. Sans oublier l’un des plus importants pénitenciers du Brésil, créé au début du XX° et fermé depuis une vingtaine d’années.

Dès notre arrivée, nous ressentons ce petit goût de paradis perdu. Devenu commun, mais toujours plus agréable. Cette île est un joyau. Pas de véhicules, pas de buildings, pas de hordes de touristes. Juste ce qu’il faut de nature, de mer turquoise, de montagnes et de brésiliens accueillants. Le tout dans des proportions divines. Heureusement, les autorités locales, comme les habitants, en sont conscients et protègent ce bijou des griffe$ de l’arg€nt.

Sans logement réservé (une habitude de plus en plus naturelle), et pendant que les allemands rejoignent leur pied-à-terre, nous errons dans les ruelles sablonneuses de Abraão. Les offres de logement ne manquent pas. Plus sympa les unes que les autres, et surtout, en harmonie avec les lieux. Nous sommes abordés par un homme à vélo. Pillel de son nom. Prononcez Piiiléééoueuh.
Comme nous sommes au Brésil, tout se passe naturellement, comme l’eau cristalline ruisselle sur la pierre lisse. On visite son auberge. On est sous le charme. Le prix est correct. La nature est présente. Le petit déj‘ promet d’être royal. La terrasse confortable. Pour 75 reais, on signe pour 3 nuits.

On s’acclimate très aisément à l’île (…tu m’étonnes). Quelques fruits, un match de foot à la télé, une sieste: elle est difficile la vie à  Ilha Grande.

Vers 19h, nous avons rendez-vous avec nos potes allemands.

Ce soir, ce sera… kebabs pour tout le monde. On n’y est pour rien. Apparement, l’allemand aime le kebab comme le portugais la sardine et le chinois le chien. Le kebab est cette spécialité allemande turque, venue tout droit de… Karlsruhe. Saskja et Raimund semblent peu friands de riz, de farine de manioc et de haricots. Bon ben, ça va être sympa votre immersion culinaire au Brésil. Nous? On se flexibilise à leurs envies (tsé, on est de vieux baroudeurs maintenant). Le bar est plutôt branché. Kebabs à gogo. Wok en plat et en show. Cocktayyyls en tout genre. Une ambiance qui sent bon le monde moderne, ses bars lounge, sa musique électro-chill out. Tiens, ça ne nous avait pas manqué.

Nos amis allemands sont tous deux environnementalistes. Ils débutent à peine leur périple de 4 semaines au Brésil. Raimund, lui, poursuivra son séjour par un projet de quelques mois dans une université de São Paulo. On ne vous cache pas qu’on a cette légère sensation d’être des vieux de la veille lorsqu’on discute voyage avec eux. Des heures d’anecdotes de voyage défilent dans nos têtes. On n’a plus peur de grand chose. Peu de choses nous choquent et tout nous amuse. C’est plaisant, d’un côté, mais d’un autre, ça sent la fin du voyage. Quant à eux, on les sent un peu verts. Ils ont lu tellement de choses effrayantes sur le Brésil qu’ils sont paralysés. On tente de les rassurer un maximum, mais seule leur propre expérience comptera.– Non, le brésilien ne mord pas. Même pas l’indigène en position défensive. T’inquiète!
– Des kebabs à Rio? Evidemment. Il y a plein d’allemands là-bas, tu sais. 
– Les animaux en Amazonie? Dangereux? Oooh, si peu. Ils sont super gentils. Ils dansent la samba. Festaaa…!
– Est-ce que la sauce est piquante? Dans le doute, abstiens-toi.
– Comment? En Allemagne, le service est nettement plus efficace. Ouais, j’imagine.
– Vous ne mettez pas une télé partout? Surtout pas dans un resto? Ouais, ben ici, ils ne mettent pas de sandales avec des chaussettes blanches, hein!
– Pourquoi il rigole? Je sais pas… Parce qu’il est heureux?
– La criminalité à Rio? Comme le soleil à Bielefield, ‘y en a pas. 

Après cette soirée, somme toute agréable, nous nous écroulons dans notre confortable lit.

A Ilha Grande, il y a LA plus belle plage du monde: la praia de Lopes Mendes. Nous, on ne croit personne. On veut la voir de nos propres yeux. C’est parti pour 2h30 de traversée de la jungle. A 4.

Un mini-trek de toute beauté. Entre jungle humide, rochers glissants et plages à couper le souffle. Pas un chat. Mais plein d’oiseaux et d’insectes spéciaux. C’est réellement superbe.

En arrivant à Lopes Mendes, légère déception. Siii… C’est beau. C’est même très beau. Mais surement pas la plus belle du monde. Celles qu’on vient de traverser, sur le parcours, sont mêmes plus belles. Faut avouer que le léger brouillard n’aide pas. Mais, malgré tout, elle est un peu trop longue et plate pour des fans de petites criques comme nous. Qu’à cela ne tienne, on se baigne, on bronze, on chill in et out.

Pour le retour, les filles lâchent l’affaire. Elles prennent un bateau de pêcheurs. Pour Raimund et Nels, c’est le défi sportif. Rentrer en moins d’une heure. Une course. Un trail. A travers la jungle. Tu vas suer mein lieber freund.

37 fractures de la cheville évitées pour Nels et 4 greffes du poumon pour Raimund, plus tard: mission accomplie. Avant même l’arrivée du bateau.

Le soir, après un peu de shopping pour les filles, on se fait un resto local. C’est Angie et Nels qui choisissent. Ouais ben, on choisira plus. Promis. C’est pas ça. Pour nous, c’était très bon. La moqueca, plus que respectable, nous satisfait pleinement. Mais nos copains allemands sont légèrement plus exigeants. Après la nappe qui est moche, les couverts dépareillés, la télé qui est allumée, le service qui est trop lent et pas assez souriant, le cadre qui est pas assez in, les tables qui sont en bois, le plat qui est trop piquant, le riz qui est trop blanc, les crevettes pas assez cuites et la nuit pas assez ensoleillée. Wohooo, on termine le repas vivants.

Pour se récompenser de notre haute bienveillance, on s’arrête chez un petit vendeur ambulant de pâtisseries. Et là, c’est le rêve: un pudim de leite (une sorte de pudding de lait concentré, déjà rencontré au Pérou, et très apprécié dans la famille de Nels) et un gâteau à la noix de coco et à la farine de manioc. Un régal. Mieux. Un régal.

Pour parachever cette journée allemande, on s’enfile quelques caipirinhas. Zzz…zzz…zzz...

Au troisième jour, on vous parle du petit dej‘. Une tuerie. Un buffet hyper varié et complet. On s’en cache pas: on BLINDE. Depuis qu’on est sur le sol brésilien, on se régale.

Vous parler de la Pousada de Pillel, sans évoquer son event and marketing manager for turistic affairs serait un crime. Comment vous l’expliquer. Une description, peut-être. Un athlète d’1m90. Bronzé. Plutôt sec. Des cheveux mi-longs, noirs, bouclés, volumineux et extrêmement soyeux. Un sourire colgate grandiose. Un visage, entre Sacha Baron Cohen, Antonio Banderas et Rui Costa (cliquez sur les noms). Une démarche chaloupée. Un air guilleret. Un ton hype & marketing. Chaque matin, il débarque au petit dej‘, le pouce levé. Pouce qu’il lève à chaque phrase lente et robotisée qu’il prononce. Expliquant chacune de ses informations comme s’il exécutait un exercice d’articulation. Utilisant des tournures de phrases fantastiques, incluant systématiquement le mot « Porém » (nonobstant):

– Cette plage est très belle, nonobstant l’immaculée beauté de l’île dans sa globalité. 
– Si j’étais vous, je prendrais cette option, nonobstant, et compte tenu de la pluviométrie locale, j’eusse plébiscité le choix le plus opportun pour vous.

Hein?

On l’écoutait avec un malin plaisir et un léger sourire moqueur, bien pâle face à sa très large et clinquante dentition. Un personnage. Du charisme.

Aujourd’hui, il pleut. On annule nos amis allemands. On se pose à l’hôtel, et malgré l’absence de wifi (pour les mauvaises langues), on kiff grave.

En milieu d’après-midi, on se dirige vers la plage du village. Petite. Cosy. Peuplée de bateaux. Un transat. Un verre. Quelques croquettes à la brésilienne. On se détend. On a l’impression de vivre. De choisir. De ne dépendre de rien. Ni de personne. D’être libres. De rester là. De ne rien faire. De ne pas penser au moment d’après. Zéro contraintes. Le moment présent. La pleine conscience. L’amour. La joie. La beauté. Ok, on arrête…

Le soir venu. Le dernier sur l’île. C’est bundesligastyle. Donc, c’est kebab party. Vous vous en doutez, Saskja et Raimund sont des nôtres. On les taquine sur leur large palette culinaire et on passe un énième bon moment sur cette île paradisiaque.

Le repos accumulé sur Ilha Grande nous fait du bien. On se sent prêts à attaquer Rio de Janeiro. Surtout, on se sent apaisés. Sereins. C’est vrai qu’il ne reste qu’un mois. Jour pour jour. Un mois. Mais on est heureux. Pas anxieux. Conscients de ce qui est passé et de ce qui est encore à venir.

La vie est belle. Até a proxima Ilha Grande. Rio, on arrive!

Les photos de cette perle sont plus bas.

Nels

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